34 e D. (z,-&–ARTISTES D’AUJOURD’HUI K.O. Gatz, peintre allemand né en 1914, présente, depuis 1949, des tableaux abstraits d’un genre particulier. Venu du surréalisme, il se jette, à corps perdu, dans l’abstrait. Ce qui est remarquable, c’est, non seulement le fait qu’il évolue dans l’étroit domaine des formes avec une fidélité constante, mais encore et surtout, ce qui nous frappe, c’est, en dehors de toute recherche de la qualité de son oeuvre, la date à laquelle elle nous est apparue. Qui, parmi les plus jeunes peintres allemands, avait déjà trouvé sa voie à cette époque ? Son extérieur calme et apaisant cache, en réalité, une nature bouillante, avide de mouvement, où toutes les impulsions, quelque soit leur origine, laissent leur trace : c’est ainsi que, contemplant les fjords nordiques, ou s’intéressant à la civilisation japonaise Zen, il est, en même temps, préoc-cupé du mécanisme ondulatoire des vagues, s’intéresse au mouvement des hélices, ou suit le sillage d’une vedette d’assaut. Sa nature a toujours évolué suivant un processus uniforme, et, quand on l’a bien examinée et comprise, ses oeuvres nous sont immédiatement familières. Ce n’est que plus tard, en examinant ses tableaux, qu’il sera possible de retrouver le thème choisi, le sujet qui l’a inspiré, et, à quel stade évolutif ils pourraient appartenir. Impression de la toile, recherche du thème pictural, étude des procédés et des genres — en admettant que ces différentes opérations soient conci-liables — n’apparaissent pas aussi simples qu’on pourrait le penser a priori. Gôtz recherche des nuances, plus précisément, des nuances de matières fugitives. Parmi les grands thèmes qui le sollicitent, il recherche, en quelque sorte, les détails les plus infimes qui, d’après lui, sont suscep-tibles d’être mis en valeur. (N’oublions pas que sa vocation de peintre remonte à 1936, époque à laquelle il entreprit des essais sur des films abstraits, des photogrammes.) En tout cas, nous sommes en présence d’un royaume indéfini, où des tourbillons véhéments s’entrelacent, tournoient sur eux-mêmes, culbutent, tombent, remontent, étourdissent — tels les mouve-ments giratoires du vent et de l’eau. Les contrastes surgissent comme des rythmes, mettant en opposition les notions extrêmes de courant et de résistance ; où. par comparaison, le vent K.O. Gotz par Kh, Goerres est ce fluide transparent, mouvant, désordonné et destructeur, où la vague représente le reste de la matière plus consistante, à la fois passive et agitée. Leur jeu alterné, cette épreuve de force ininterrompue, donne lieu chez Geitz à ces éclats disciplinés qui portent la marque d’un geste mi-conscient, mi-inspiré. Mais comment obtenir une forme d’image cohérente, précisément avec des formes essentiellement mouvantes, dispersées ? En disciplinant l’agi-tation, la dispersion, inhérente à l’acte pictural, en regroupant ces diffé-rents éléments naturellement épars et isolés. C’est, en réalité, beaucoup plus vite dit que fait, car l’image d’un mouvement violent, rapide et vigou-reux, doit être immédiatement balancée sur la toile posée à même le sol. La matérialisation du mouvement est le stade initial et final de la sensi-bilité. Les couleurs élémentaires sont rapidement balancées sur la toile, ici, en un trait large, appuyé ; là, en filets minces, aériens. Les flots de rubans, épars au début (1952) ont été noués pour former des gerbes gra-phiques, des chemins aux sinuosités compliquées, se dressant comme une tour, et aboutir enfin à des mouvements dialectiques d’une surface bariolée d’un espace, encore lointain, à la fois réel et dématérialisé. Il s’agit de créer sur cette surface plane l’impression du balancement, de trouver dans l’espace des événements de continuité causale, et de les accorder avec la rythmique formelle. C’est ce qui a précisément lieu aux points de rupture, où la clarté s’oppose violemment aux ténèbres, le plus fort au moins fort et où il existe, cependant, un tout fonction de la puis-sance de deux « éléments ». Giitz laisse les couleurs se fondre dans ses graphismes mouvants, el donne ainsi à ses tableaux une touche de pittoresque. Il est tout aussi capable d’endiguer le flottement de ce fleuve, de le discipliner, mais, finale ment, tout revient à créer un tableau, où la participation individuelle de l’homme à ce mouvement rythmique, s’accorde directeme~t avec même. Cela ne peut réussir que dans la mesure où ce le choix des couleurs, des formes, et, jusqu’au fond et au conto s’intègre à la surface même ; ainsi est conservée non sre q mais la force du courant lui-même.