DANS LES GALERIES u,uu, t 1 M U S I 12 CLAUDE BAIGNÈRLS’ ABEL SAVIN (Galerie Le Bateau-Lavoir). Ediœur de métier, il a passé toute sa jeunesse à dessiner le visage de ses amis. Il est par-venu maintenant à une force dans le trait qui, sans atteindre à la caricature, exprime l’essentiel d’un caractère. Ses recherches picturales sont faibles, mais ses petites sculptures ont u humour qui fait parfois songer 1 Daumier. A. SAVIN PORTRAIT DUN AMI AQUARELLES ET DESSINS (Galerie du Cirque). A l’exception de Picasso et de Legueult, ces mer-veilleux dessinateurs, qui sont aussi peintres, ont tons disparu puis. se noment Vuillard, Pascin,ils Marqumet, Derain, K. X. Roussel. Le Picasso est peut-étre la plus amusante de ces cartes de visite » de grands artistes. Celui-ci s’est représenté assis devant une cage, regardant attentivement un oiseau. Vuillard a montré Tristan Bernard au vélo-drome Buffalo, attendant impa-tiemment le spectacle. Marquet campé ses promeneurs si pitto-resques; Pascin,en quelques notes colorées, dans une œuvre bien différente de ses petites filles perverses, nous invite à goûter les charmes d’Ostende. MARQUET : LE COUPLE z CELICE CHERBOURG, LA PLAGE. CELICE (Galerie Simone Bach-nier). Dans une gamme de cou-leurs parfois un peu violente, il transpose ta nature avec un tem-pérament indiscutable. Il se rap-proche de Nicolas de Staël, dont il n’a pas encore la maitrise. ÉLISABETH Omis (chez Daran-tière, éditeur). Inoubliable illus-trateur d’ u Alcools » d’Apolli-naire, elle expose des projets très savoureux pour les fables de La Fontaine, dans lesquels, le plus souvent, les animaux sons remplacés par des personnages. Nous aimerions trouver dans ses huiles la même sobriété, la même force que dans ses différentes recherches en blanc et noir. ÉLISABETH LLE,U ToE,A,T;r0›, FABLE UE LA DANSE A L’OPÉRA LP Défilé du coq, de ballet est certainement à l’heure actuelle l’un des plus brillants spectacles que l’on puisse voir à l’Opéra de Paris. La scène, prolongée par le foyer, acquiert une perspective unique au monde et les « petits rats «, suivis des coryphées, des premières danseuses, des quadrilles et des étoiles, semblent déferler du fond de l’horizon. Avec Nina Vyroubova et Yvette Chauviré, la danse française possède sans doute les deux plus étincelantes ballerines du moment, et l’on s’étonne de ne pas les voir conduire or défilé. Pour compenser notre déception — sans nous la faire oublier — pour nous rassurer aussi sur l’avenir de l’Académie et de la Compagnie, voici, au ond rang, plusieurs futures vedettes dont le rayonnementsec fait pâlir déjà les étoiles offi-cielles. Retenons les noms de MM. Duthoit et Meyer, ceux de AlBeI1 Josette Amicl et Claire Motte. Nous les verrons rapidement s’imposer aussi sur les affiches. Le répertoire s’enrichissait ce soir-là d’un nouveau ballet créé à Munich l’an dernier et intitulé le Chemin de lumière. L’argument d’Antoine Goléa conte les aventures âpres ou voluptueuses d’un jeune homme qui succombera à bien des tentations avant de suivre la pure jeune fille qu’il n’a jamais cessé d’aimer. C’est avec des anecdotes simples et banales que l’on fait souvent les meilleurs ballets ; celui-ci n’échappe pas à la règle, bien que la chorégraphie de Serge Lifar brouille un peu les cartes en introduisant des symboles assez obscurs. Je pense notamment à l’entrée de ces trois personnages déguisés en Conventionnels et qui représentent, m’a-t-on dit, la cruauté dépravée. On sent, d’autre part, que plusieurs variations ont été arbitrairement ajoutées, ce qui rompt la marche de l’action et nuit à la progression dramatique. C’est à ce défaut cependant que l’on doit de voir Claude Bessy exécuter avec un brio étourdissant et triomphal « jetés u, « tours « et « fouettés pour séduire Peter van Dijk. Claude Bessy manque un peu de lyrisme, mais ici il n’en faut point ; la vélocité provocante, la séduction froide mais irrésistible doivent suppléer la tendresse ; il y a là un rôle qui s’apparente à celui de la Reine des Wlllls dans Girelle ou à celui d’Odile dans le Lac des Cygnes il ne saurait être mieux tenu. Claire Motte, malgré le costume qui entrave ses mouvements, s’impose par la rigueur de s style. Enfin, il y a Josette Amiel et Peter van Dijk.on Ce dernier possède avec Michel Renault la meilleure « batterie « de l’Opéra ; artiste jusqu’au fond du cœur, il est l’interprète idéal de la passion, du désespoir et du désir. Sa sensibilité transparaît dans les attitudes les plus académiques ; il joint l’art du fondu à celui de la précision ; il est danseur, mais aussi comédien et poète. Quant à Josette Amict, elle a fait depuis un an des bonds spectaculaires vers le champ des étoiles ; elle est en pleine possession d’une technique qui ne laisse rien au hasard et conjugue le charme et la virtuosité. Elle a — le fait est rare dans l’école française —des bras qui participent aux lignes de la chorégraphie et une sûreté qui lui permet ces « ralentis s, seuls susceptibles de donner l’impression d’un abolissement des lois de la pesanteur. Le Chemin de lumière bénéficie en outre de la meilleure partition que Georges Auric ait jamais écrite : une musique inspirée, raffinée, haute en couleur, éminemment« dansable z, à laquelle manque seulement peut-être le piment de la volupté. Ce ballet connaîtrait un succès beaucoup plus large s’il ne semblait une résurgence de ces Mirages dus jadis aux mêmes auteurs s Lifar s’est trop fréquemment souvenu de sa chorégraphie antérieure et les décors de Cassandre reconstituent une atmosphère dont nous avons déjà épuisé les vertus. Notons que le Chemin de Lumière devait faire carrière avec un ballet de Jacques Chailley et Jean Cocteau, la Dame à la licorne, dont la création est remise à une date indéterminée. Il faudra donc se consoler et trouver une pâture nouvelle au Palais Garnier avec l’Allantide, d’Henry Tomasi. Le rôle principal de cet opéra est tenu par Ludmilla Tcherina. N’est-ce pas là un élégant procédé pour rameuter au profit du théâtre lyrique la cohorte sans cesse grandissante des ballettomanes ? C. 13.